L'ensemble de ces observations est analysé finement et les efforts calculés de telle sorte qu'il sera possible de prévoir pour chaque insert technique la résistance minimale nécessaire attendue.
Ces quelques vues en coupe permettent de révéler la disposition des inserts techniques dans le corps de la statue pour les trois zones de jonction. L’accès par le dessous du socle où une cavité a été creusée sans doute dans le but d’alléger quelque peu l’oeuvre autant que de favoriser sa stabilité par un appui sur la périphérie de la base ovale, permettra de mettre en place un dispositif pour tendre les deux câbles.
Il est remarquable de constater sur cet autre modèle la conjonction de la verticale du centre de gravité avec la cheville de la jambe porteuse. Une fois encore l'exactitude de la figuration assure une parfaite corrélation entre l'équilibre du corps d'un modèle dans la pose demandée et celui recherché implicitement par l'artiste pour la juste répartition des efforts dans la forme de l'œuvre. Une réflexion empirique est alors menée afin de comprendre la nature des efforts subis par le couple matière/forme en statique et en dynamique.
Dès lors que les parties sont modélisées et la sculpture reconstruite, il est entrepris l'analyse de la statique de l'œuvre. Le centre de gravité de la partie supérieure est calculé. Il se trouve positionné au croisement des deux lignes sur l'image ci-dessus. Sur l'image ci-dessous, le volume est divisé en quartier par deux plans perpendiculaires passant par la verticale du centre de gravité.
Le volume du bloc dans lequel la statue a été taillée, si tant est qu’il fut cubique, aurait donc été de 2,53 m3. Or le volume global de la statue mesuré par le logiciel sur le modèle informatique est de 0,185 m3. L’œuvre n’occupe donc que 7,3 % du volume cubique dans lequel elle s’inscrit. Le sculpteur aura enlevé plus de 9/10e de la matière pour réaliser son œuvre.
La statue étant fragmentée en deux parties, la base et le corps, le volume se répartit donc comme suit :
- Base : 102201361 mm3 soit 0,1022 m3
- Corps : 82926506 mm3 soit 0,0829 m3
Si la densité du marbre est de 2,7 (il semble en effet assez dense) les valeurs approchées du poids de l’œuvre seraient respectivement de :
- Base : 275,94 kg
- Corps : 223,83 kg
Soit un poids total de 499,79 kg
La colombe et la fourmi
Sculpture en marbre de Corbel, musée du Berry de Bourges
La statue est taillée dans un marbre gris fin. Le personnage, un jeune homme grandeur nature doit mesurer environ 1,70 m, sa dimension étant prise par tronçon du fait de sa forte cambrure arrière (du sommet de la tête à l’un puis l’autre des talons, elle ne mesure que respectivement 1,45 à 1,55 m).
La statue quant à elle, du fait de l’altitude de la base et du geste ample du personnage, prend place dans un volume englobant beaucoup plus vaste dont les dimensions atteignent, 2,176 m de hauteur, 0,911 m de profondeur et 1,277 m de largeur, dans une disposition orthogonale dirigée, par le plan du sol naturellement et deux plans tangents au socle, l’un à l’arrière (côté opposé à l’inscription et à la face du personnage) et l’autre à son côté droit. Les deux plans opposés sont de fait tangents aux extrémités des doigts de la main gauche pour la face et à ceux de la main droite pour le côté droit.
L'audace technique du sculpteur a créée des zones de fragilité structurelle sur les isthmes de la matière (cheville droite, pied gauche, jonction du pont et de la cuisse) dont les efforts considérables occasionnés par une manutention ont provoqué la rupture.
En C, comme en A, la retenue au basculement du corps vers l’avant s’exerce à la fois en traction sur le tenon métallique qui relie les deux parties, mais aussi dynamiquement en traction et en pression le long du tronc en pierre et plus particulièrement au niveau où il est le plus étroit.
Enfin, ne perdons pas de vue les efforts statiques qui s’accroissent considérablement en dynamique sur les parties saillantes du corps dont le poids propre s’exprime en porte-à-faux. Quelle valeur serait susceptible d’engendrer une cassure lors de transport ou de choc accidentel au sol sur les isthmes de la matière en C et en D sur le parcours des bras ?
En B, je veux indiquer une possible faiblesse qu’il pourrait falloir évaluer lorsque l’axe du centre de gravité sort du corps de la jambe porteuse. C’est le cas à deux endroits, au dessus du genou et au niveau de la cheville où cet effort en cisaillement est à considérer sur la pierre comme sur l’insert métallique.
En A, je représente les efforts de retenu du balancement du corps tels qu’ils s’exercent dynamiquement dans la jambe gauche et son attache lors d’un déplacement de l’objet. Cet effort est évidemment plus critique au niveau de la cheville et à la jonction des deux parties où il s’exerce en tension sur le câble, en cisaillement sur le tenon de centrage et en pression sur les doigts qui forment une retenue saillante sur la base.